2009年12月29日 星期二

Nouvelle vague d'arrestations d'opposants en Iran

LE MONDE | 29.12.09 | 12h22

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2009/12/29/iran-le-pouvoir-traque-sans-pitie-l-opposition_1285684_3218.html#ens_id=1190750

En Iran, la répression ne désarme pas. Au lendemain de la fête religieuse de l'Achoura, dimanche 27décembre, au cours de laquelle les forces de l'ordre ont tiré sur des manifestants hostiles au pouvoir en place, faisant officiellement au moins huit morts (dont cinq à Téhéran), une nouvelle vague d'arrestations s'est abattue lundi sur les rangs de l'opposition.

Parmi les personnes arrêtées figurent des proches de l'ancien président réformateur Mohammad Khatami, dont Hassan Rassouli et Morteza Haji et trois principaux conseillers de Mir Hossein Moussavi, candidat malheureux à la présidentielle contestée de juin, remportée par Mahmoud Ahmadinejad, devenu la figure de proue de la contestation. Il s'agit de Ghorban Behzadian, Mohammad Bagherian et d'Ali Reza Behechti Shrirazi, directeur du site officiel de M.Moussavi, Kaleme.org.

Cette nouvelle "rafle" n'a pas épargné la presse. Mahmoud Shamsolvezine, le président de l'Association des journalistes, a été arrêté ainsi qu'Emadeddin Baghi, figure emblématique en Iran, lauréat du prix des droits de l'homme de la République française, ainsi que Noushine Ebadi, la sœur du Prix Nobel de la paix, Shirin Ebadi, qui, elle, n'est pas rentrée en Iran depuis plus de six mois.

KAROUBI ATTAQUÉ

L'un des principaux leaders du mouvement de contestation, le religieux Mehdi Karoubi, qui avait dénoncé le premier les tortures et les viols en prison, a même été attaqué lundi alors qu'il quittait en voiture une cérémonie de deuil dans une mosquée à l'est de Téhéran. Selon ses proches, sa voiture a été malmenée et le pare-brise cassé. La foule a mis en fuite les assaillants. La police, dans le même temps, a fait une perquisition au siège du magazine féminin Irandokht, dirigé par Mme Karoubi.

Enfin, le corps du neveu de Mir Hossein Moussavi, Ali, tué par balles dimanche, a été enlevé de la morgue où il se trouvait et la famille pense que les autorités tentent ainsi d'empêcher qu'à l'occasion des funérailles, ayant lieu normalement dans les vingt-quatre heures, il y ait d'autres débordements.

LOURD BILAN

Dans ce climat de tension extrême, qui s'est aussi accompagné d'une "mise au pas" de plusieurs sites Internet, beaucoup craignent à présent que la répression n'ait plus de freins. "Un pas a été franchi lorsque le gouvernement n'a même pas respecté le deuil du Moharram et de l'Achoura qui interdit tout acte guerrier et toute confrontation. J'ai peur qu'il n'y ait plus de freins à la répression", explique par téléphone un professeur de droit à Téhéran. C'est aussi l'avis de l'analyste iranien Ahmad Salamatian pour qui une "militarisation de la répression n'est pas à exclure" et qui estime que "le Guide suprême, Ali Khamenei, jusque-là partagé sur la réaction à adopter, s'est fait prendre la main par la faction la plus dure au sein des fondamentalistes au pouvoir".

Quant au président de la Ligue des droits de l'homme iranienne, Karim Lahidji, il déclare: "La contestation est arrivée à un tournant. On peut craindre en retour une répression accrue, un véritable bain de sang."

Six mois après l'élection présidentielle contestée du 12 juin, le bilan est lourd : une quarantaine de morts officiellement (l'opposition parle d'une centaine); plus de 4 000 arrestations auxquelles s'ajouteraient un millier d'autres depuis dimanche dans tout le pays; cinq condamnations à mort; des peines allant jusqu'à quinze ans de détention pour les opposants.

La situation des droits de l'homme est "la pire qu'ait connue le pays depuis vingt ans", selon un rapport d'Amnesty International qui dénonce "la torture, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires" et note que "les investigations annoncées par les autorités iraniennes semblent avoir pour objectif de dissimuler les atteintes aux droits humains plutôt que de faire éclater la vérité".

Pour Karim Lahidji, le plus préoccupant, outre la violence, est le côté "systématique" de la répression. "Lorsque quelqu'un est arrêté, il est souvent soumis à de mauvais traitements ou forcé de faire des “aveux” pour justifier une condamnation à venir, mais c'est aussi tout son entourage qui est visé. Cela ne s'était jamais produit, explique-t-il. Par exemple, on exige des cautions exorbitantes, c'est la famille entière parfois qui hypothèque tous ses biens pour faire sortir celui de ses membres qui a été arrêté. Ce fut le cas de jeunes blogueurs qui sont ensuite partis pour l'étranger. A présent, leurs parents sont otages: le gouvernement leur dit ou vos fils reviennent ou votre appartement hypothéqué est à nous et vous serez à la rue."

ARBITRAIRE EN DÉTENTION

Dans d'autres cas, explique-t-il encore, les proches de la personne arrêtée perdent leur travail. Et de donner l'exemple de la journaliste Nargues Mohammadi, porte-parole du centre pour les droits de l'homme animé par le Prix Nobel de la paix Shirin Ebadi. "Le mari de Nargis, Taghi Rahmani, qui appartient à un mouvement progressiste a passé dix ans en prison. A sa sortie, il était bien sûr au chômage. Sa femme, qui travaillait dans un centre social, a été convoquée il y a trois semaines, on lui a signifié qu'elle était licenciée. Ils sont sans ressources avec des petites filles jumelles de 4 ans à élever."

En prison, l'arbitraire est de mise. D'après les confidences de la femme du journaliste économique Said Leylaz, condamné à neuf ans de prison, en six mois, elle n'a vu son mari, en prison, que deux fois. Lui n'a jamais su quand se tiendrait son procès. Un jour, on l'a prévenu qu'il avait dix minutes pour préparer sa défense. Son avocat n'était pas convoqué, on l'a juste informé de la sentence.

Quant à Behzad Nabavi, un ex-ministre de 72 ans, condamné à six ans de prison, il a dû être opéré, sa santé était mauvaise. Pour pouvoir se reposer chez lui une semaine, il a versé une caution de 650000 euros. Mais, comme il avait raconté ses conditions de détention à des amis, on l'a remis en prison, malgré la caution.

Certains sont en prison depuis six mois, sans que l'on sache s'ils auront un procès. C'est le cas de l'ex-vice-ministre de l'intérieur Mostafa Tajzadeh, de l'ex-porte-parole de la présidence réformatrice de M.Khatami, Abdullah Raminzanzadeh, ou encore d'Ahza Mansouri, membre du bureau politique du parti réformateur.

La répression vise aussi en particulier les minorités: un jeune Kurde a été pendu le mois dernier à Sanandaj, alors qu'en première instance il n'avait été condamné qu'à dix ans de prison. Le régime multiplie aussi les exécutions publiques de criminels de droit commun – ou présentées comme telles –, juste pour intimider toute tentative de contestation. En 2008, 380 exécutions ont eu lieu en Iran. Ironiquement, un des rares journaux à avoir ouvertement critiqué cette politique, Hayat-e-Now ("nouvelle vie"), est dirigé par un frère cadet du Guide suprême, Ali Khamenei. Le journal a été suspendu.

Marie-Claude Decamps

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