LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 28.12.09 | 18h43 • Mis à jour le 28.12.09 | 21h53
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2009/12/28/la-communaute-internationale-condamne-une-repression-inacceptable_1285579_3218.html#ens_id=1190750
Dénonçant la violence "brutale" et "inacceptable" des autorités iraniennes, la communauté internationale a vivement réagi à la répression des manifestations qui ont fait au moins huit morts dimanche 27 décembre à Téhéran.
S'exprimant depuis Hawaï, où il se trouve en vacances, le président américain, Barack Obama, a dénoncé lundi une "répression violente et injuste" de citoyens "innocents", soulignant que les Etats-Unis se tenaient au côté des manifestants iraniens dont la soif de justice s'est heurtée à une "brutalité de fer". Le chef de la Maison blanche a exhorté la République islamique à libérer "immédiatement" les personnes "injustement emprisonnées".
Le ministre britannique des affaires étrangères, David Miliband, a qualifié de "particulièrement troublant" le "manque de retenue" des forces de l'ordre. Il a salué le "grand courage" des manifestants, insistant sur le fait que "la mort tragique de manifestants en Iran nous rappelle à nouveau comment le régime iranien gère les manifestations".
En Allemagne, la chancelière Angela Merkel a tenu à assurer les proches des victimes de sa "compassion". "Je condamne les récents affrontements violents en Iran, au cours desquels l'intervention inacceptable des forces de sécurité a coûté la vie à plusieurs personnes", a ajouté dans un communiqué.
Lors d'un point-presse, le porte-parole du ministère des affaires étrangères français a renouvelé "sa grande anxiété et sa condamnation des arrestations arbitraires et des violences commises contre de simples manifestants". "L'aggravation de la répression ne mène nulle part", a-t-il souligné.
Même la Russie, proche de Téhéran, s'est dite "inquiète" de la flambée des violences. "A notre avis, dans cette situation, il est essentiel de faire preuve de retenue, de chercher des compromis sur la base de la loi, de faire des efforts politiques pour éviter une poursuite de l'escalade dans la confrontation intérieure", a indiqué le ministère des affaires étrangères dans un communiqué.
"En Iran, le rapport de force n'est pas le même qu'en 1979"
LEMONDE.FR | 28.12.09 | 16h46 • Mis à jour le 28.12.09 | 16h55
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2009/12/28/en-iran-le-rapport-de-force-n-est-pas-le-meme-qu-en-1979_1285363_3218.html#ens_id=1190750
Pour Bernard Hourcade, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de l'Iran, "la pression de la rue n'a pas trouvé une expression politique suffisamment solide pour renverser le gouvernement".
De violents affrontements ont opposé dimanche les forces de l'ordre et les manifestants hostiles au président Ahmadinejad. La contestation est-elle à un tournant ?
Je ne le pense pas. L'intensité des violences était à la hauteur de l'ampleur des manifestations. La célébration de l'Achoura est l'une des dates les plus importantes du calendrier chiite. Chaque année, des millions de personnes défilent à travers le pays pour commémorer le martyre de l'imam Hussein. Ces grandes processions religieuses rassemblent toutes les composantes de la société iranienne. Il était logique que les opposants en profitent pour s'exprimer. Mais je ne crois pas que cette radicalisation marque un réel tournant pour le régime iranien.
Vous étiez en Iran pendant la révolution de 1979. Observez-vous des similitudes entres les événements qui secouent le pays depuis six mois et les manifestations qui ont abouti au renversement du chah ?
En 1979, les grandes processions de Tassoua et de l'Achoura [journées de deuil religieux qui commémorent le décès de l'imam Hussein] étaient organisées par le mouvement de contestation. Malgré la loi martiale, le chah avait été obligé d'autoriser les manifestations. Elles rassemblaient à l'époque l'ensemble des opposants, qu'il s'agisse de la gauche ou des religieux. Le clergé soutenait massivement les contestataires. Le rapport de force n'est pas le même aujourd'hui. Une partie importante de la population défend toujours Ahmadinejad. Les processions de ces derniers jours étaient organisées par le gouvernement. Il s'agissait d'abord de manifestations populaires auxquelles se sont mêlés les opposants. On ne peut comparer les événements de 1979 avec le mouvement de contestation actuel.
Mais le mouvement semble prêt à poursuivre la mobilisation (Lire : Pouvoir et opposition se radicalisent en Iran).
C'est vrai que l'opposition ne faiblit pas, malgré la répression. Mais les contestataires ne sont pas unis politiquement. Entre ceux, peu nombreux, qui souhaitent renverser le régime et ceux qui veulent seulement le changer, il n'y a pas de consensus sur un leader, comme en 1979. Il ne faut pas oublier que Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi sont des personalités fondatrices du régime. L'un a été premier ministre pendant la guerre Iran-Irak, l'autre un compagnon de route de l'ayatollah Khomeini. S'ils ont endossé les habits de la révolte, c'est un peu malgré eux. Ils assument une responsabilité qu'ils jugent historique, mais restent des opposants par défaut. Pour les plus radicaux qui veulent en finir avec la République islamique, Moussavi et Karoubi ne sont pas capables de porter le mouvement.
Face à cette contestation, le pouvoir fait-il bloc ?
Non, on observe des dissensions de plus en plus fortes à l'intérieur même de l'appareil d'Etat. Les partisans de la répression, proches du président Mahmoud Ahmadinejad, prêchent pour le maintien de l'ordre avant tout, sans compromis avec les manifestants. C'est un peu la méthode chinoise : verrouiller l'intérieur, mais s'ouvrir à l'international en répondant à la main tendue d'Obama. Mais d'autres, comme Ali Larijani, le président du Parlement, Mohsen Rezai, ancien commandant en chef des gardiens de la révolution, ou Mohamed Baker Khalibaf, le maire de Téhéran, sont favorables à une évolution du régime. Même parmi les plus radicaux, certains condamnent la répression et la mort d'autres musulmans.
Ces dissensions gagnent-elles les rangs des forces de l'ordre ?
C'est très difficile d'avoir des éléments précis sur ces questions. Il semble que certains membres des bassidjis, de l'armée et de la police se désolidarisent du pouvoir. Mais il est un peu tôt pour parler de dissidence ouverte. Si c'était le cas, le régime serait vraiment en mauvaise posture. Il ne faut pas oublier que ce sont des soldats de l'armée de l'air qui ont été les premiers à se révolter contre le chah en février 1979.
Aujourd'hui, le gouvernement iranien est très fort. Même si les résultats officiels sont éminemment contestables, Ahmadinejad a été élu et il est très probable qu'il ira jusqu'au bout de son mandat de quatre ans. Le pouvoir est prêt à tout pour maintenir le régime. Et, pour l'instant, la pression de la rue n'a pas trouvé une expression politique suffisamment solide pour renverser un gouvernement aussi fort et aussi répressif.
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